L’impact de l’esthétique alimentaire sur la consommation

Rédigé par Laurine le 17/07/2020

Impact esthétique alimentaire consommation

L’esthétique alimentaire est l’une des causes principales du gaspillage alimentaire. Si une banane est tachetée l’acheteur la repose et choisit sa voisine, plus verte. Peu de chances pour notre banane tachetée de trouver un jour preneur à côté de toutes les autres. Au lieu de finir dans une assiette, elle finira surement dans une benne derrière le supermarché. Notre exemple est loin d’être un cas isolé, l’Agence de la transition écologique (Ademe) révèle qu’en France, une salade verte sur deux est jetée, que ce soit par les producteurs, les distributeurs ou les consommateurs. Peu de personnes réalisent que manger beau est un automatisme qui entraîne énormément de gaspillage.

Pourquoi mangeons-nous beau ?

1. Le poids de l’esthétique alimentaire

Aujourd’hui l’apparence est centrale dans notre société. L’émergence de réseaux sociaux fondés sur l’image ne fait qu’accentuer ce phénomène qui se répercute sur tous les aspects de notre vie, jusqu’aux plus essentiels comme le choix de notre nourriture. Le hashtag #food est mentionné 400 millions de fois sur Instagram et son petit frère #foodstagram déjà 71 millions, rien d’étonnant si cette mode se retrouve dans tout le secteur de l’alimentaire. 

Beaucoup de personnes l’avouent, certains de leurs repas sont motivés par la réalisation d’un super cliché. Un sondage réalisé par OpinionWay, en partenariat avec l’événement Taste of Paris, révèle que 40% des français dégainent leur smartphone pour immortaliser un plat au restaurant. Pour surfer sur cette vague, des établissements se spécialisent dans les plats instagrammables, si bien que des guides sur Les pizzeria parisiennes les plus instagrammables apparaissent.

Cependant, cette mode du “manger beau” se heurte à d’autres tendances comme la tendance anti-gaspi évoqué dans un autre article Save Eat. Ces deux tendances se croisent déjà et poussent les consommateurs à “manger beau et malin” un duo gagnant qu’il faut continuer de mettre en avant.

2. L’influence du marketing sur nos choix alimentaires

L’esthétique alimentaire est au centre des préoccupations des départements marketing des marques de l’industrie alimentaire ; département qui représente dans cette industrie en moyenne 10% du chiffre d’affaire des grandes marques. En effet, pour qu’un client achète un produit, ce dernier doit être agréable à la vue et correspondre à certains standards ou critères esthétiques auxquels le consommateur est habitué. Si on illustre un paquet de gâteaux avec ces derniers émiettés, les consommateurs se tourneront instinctivement vers le paquet voisin représentant les gâteaux intacts. 

C’est la même chose pour les fruits et légumes “moches”, délaissés à cause de leur esthétique trop éloignée des codes que l’on s’est imaginés. On comprend alors pourquoi la présence sur les étales d’un fruit esthétiquement imparfait n’est pas vraiment encouragée dans les supermarchés. Et c’est évidemment à force de voir des fruits et légumes parfaits dans nos magasins que les normes ont petit à petit été définies.

3. La normalisation esthétique des produits dans la grande consommation

C’est principalement un cahier des charges imposé par l’Union Européenne qui conduit à trouver aujourd’hui partout dans nos supermarchés des légumes et fruits identiques. En effet, ces “normes de calibrages” imposent des règles strictes sur la commercialisation des denrées qui doivent dans un premier temps “supporter le transport et la manutention” et “arriver dans un état satisfaisant au lieu de destination”.  Si on s’intéresse à des consignes plus précises, par exemple aux qualités commerciales des pommes exigées par l’UE, on constate qu’elles doivent avoir un poids minimal «de 90g» ou encore que les défauts de l’épiderme ne doivent pas dépasser «4cm de long pour les défauts de forme allongée». Avec seulement ces deux directives, on peut déjà se faire une idée du gaspillage engendré. Les producteurs de pommes écartent 30% de leur récolte car ils savent d’avance que leur marchandise ne sera pas achetée par les supermarchés. Si une partie est récupérée puis transformée en confitures ou jus par des entreprises telles que Confiture ReBelle ou Moi Moche et Bon, le reste est jeté. 

Cette normalisation esthétique des produits de la grande distribution donne aussi des produits avec moins de goût, de nutriments et de variétés. Une perte sur de nombreux aspects…

Pourquoi ne pas plutôt manger bon ?

1. Des priorités repensées chez les consommateurs : le bon avant le beau !

C’est une pratique systématique, les fruits et légumes parfaits des supermarchés sont traités aux pesticides et nourris aux engrais chimiques afin d’allonger leur durée de vie et de maintenir leur apparence. Si ces pratiques sont encore largement acceptées, les mentalités évoluent rapidement ces dernières années et l‘éveil écologique frappe aujourd’hui la population. Le renouveau du mouvement du “fait maison”, du bien manger, et le retour aux traditions, permettent d’inclure plus facilement des produits bio ou “moches” car l’important n’est pas l’apparence mais le goût et le désir de manger sainement. En effet, les consommateurs font plus attention à leur santé, et cela se répercute dans leurs choix alimentaires : 84% des acheteurs se soucient de l’impact de l’alimentation sur leur santé. 

Ainsi, selon un sondage mené par Harris interactive en 2017, 64% des français sont favorables à la mise en place d’un système d’étiquetage nutritionnel basé sur des critères tels que la fraîcheur des produits (67%), le respect de la saisonnalité (56%) ou encore l’absence de pesticides (59%). Un fruit bio n’est pas le plus beau, mais il sera toujours plus sain, et ça de plus en plus de consommateurs l’ont compris. 

2. Moins d’importance pour l’esthétique alimentaire ?

La modification des comportements des consommateurs impacte les marques de l’industrie alimentaire qui  décident alors d’opter pour des emballages plus neutres, qui envoient aux consommateurs des messages clairs facilitant la traçabilité du produit ou la compréhension de leur composition. Selon le bureau d’étude de Cartoffset, aujourd’hui “minimalisme et simplicité pour le design de nos emballages agroalimentaires” sont de rigueur pour plaire aux clients. Dans cette lignée, Evian vient de commercialiser début juillet 2020 une bouteille d’eau sans étiquette, gravée en PET 100% recyclé et recyclable.

Autre exemple au coeur de la tendance, la marque “C’est qui le patron ?” avec son emballage simple et facilement reconnaissable qui se présente comme la marque transparente et juste pour le consommateur. C’est Nicolas Chabanne, un entrepreneur français, qui est à l’origine de cette initiative. Il est aussi créateur du label anti-gaspi “Les gueules cassées” qui vise à valoriser les “oubliés de la grande distribution”. La première année de son lancement la marque est passée de 2 à 5000 points de vente, et d’un unique pays à 21. Une vraie revanche pour les fruits et légumes moches.

3. Grandes enseignes et esthétique alimentaire

Pour les produits sans emballage de nos rayons, on voit aussi de belles évolutions. Pour réduire le gaspillage alimentaire et tenter d’attirer l’attention sur les qualités des fruits et légumes difformes, Intermarchés a ouvert le bal en 2014 avec ses campagnes pour sauver les “fruits et légumes moches”

Depuis, des magasins comme Leclerc, Auchan, Super U ou Monoprix mettent en avant les fruits ou légumes difformes en les vendant en moyenne 30% moins cher, dans un espace et avec un étiquetage distincts. Ces initiatives sont souvent des succès mais elles sont encore peu reprises. L’achat de légumes et fruits imparfaits, même à prix cassés, n’est pas encore une habitude d’achat chez les consommateurs. 

Cette démocratisation est encore un aspect sur lequel les départements marketing des grandes enseignes peuvent se pencher. En effet, s‘il s’agit de lutter contre le gaspillage alimentaire et de répondre aux attentes des consommateurs, jeter des produits représente aussi d’immenses pertes économiques non négligeables. Selon le Ministère de la Transition Écologique, les pertes dues au gaspillage alimentaire représentent en France une valeur commerciale estimée à 16 milliards d’euros.

En conclusion

Si en matière de choix alimentaires, l’esthétique alimentaire a encore son importance, pour beaucoup de consommateurs, d’autres critères pèsent aujourd’hui davantage dans la balance. En effet, au supermarché 65% des français se fient en premier lieu à la composition des produits et seulement 20% à leur aspect visuel (OpinionWay, 2018). Ce changement des mentalités et cette tendance qui fait aujourd’hui passer “le bon avant le beau” peut être un bon indicateur de ce que nous réserve l’avenir en matière d’impact de l’esthétique alimentaire sur la consommation : moins de chichi et donc moins de gaspi.

Summary
L'impact de l'esthétique alimentaire sur la consommation
Article Name
L'impact de l'esthétique alimentaire sur la consommation
Description
Peu de personnes réalisent l'impact de l'esthétique alimentaire sur la consommation, il s'agit pourtant d'une des principales causes de gaspillage.
Author
Publisher Name
Save Eat
Publisher Logo

Retrouve encore plus d'astuces et de recettes dans le livre de Save Eat

Sommaire

Reçois toutes nos astuces anti-gaspi au fil des saisons

Cadeau de bienvenue

Inscris-toi à notre newsletter et bénéficie de 10% de réduction sur le carnet de cuisine anti-gaspi de Save Eat